Une maison de maître du XIXe siècle revisitée

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À Conches-en-Ouche, petit village normand bucolique réputé pour son centre équestre, cette maison de maître du xixe siècle revisitée par un entrepreneur local mêle tradition et modernité avec brio. Une belle métamorphose sur fond de boiseries, de matières naturelles et de tissus éclatants.
Un article de
Patricia Prioton

Le hasard fait parfois bien les choses. Un jour de canicule, un couple de Parisiens, Bertrand et Benoît, décide d’aller prendre l’air en forêt du côté d’Évreux. À peine sortis du train, les voilà séduits par la quiétude de la petite gare de Conches, lovée au milieu des arbres, à 1 h 30 de Paris-Saint-Lazare. « La rupture avec le tumulte citadin était saisissante », précise Bertrand. Amateurs de gastronomie, ils jettent leur dévolu sur une adresse recommandée par le Guide Michelin, à Conches-en-Ouche. Une promenade digestive au fil des rues le confirme : c’est le coup de cœur ! Bertrand et Benoît multiplient les visites pour trouver un pied-à-terre au sein du village, de préférence une maison ancienne avec du caractère, bien exposée et dotée d’un terrain… jusqu’à ce qu’ils franchissent le porche de cette demeure et tombent sous le charme de son jardin, à l’abri des regards et bucolique à souhait. L’ancien relais de poste, cerné de dépendances, n’avait pas été restauré depuis très longtemps. Mais Bertrand et Benoît, qui ont le projet d’y ouvrir des chambres d’hôtes et d’y séjourner eux aussi régulièrement, se réjouissent néanmoins des possibilités d’aménagement : « La bâtisse avait conservé son grand escalier en bois central, desservant les différents étages. Certes, le décor datait d’il y a 50 ans, et la distribution des pièces était à revoir pour l’adapter à notre mode de vie et l’ouvrir aux visiteurs de passage, mais nous avons réussi à nous projeter », explique Bertrand. Trois ans de travaux ont été nécessaires pour mener à bien cette cure de jouvence radicale.

La réhabilitation complète a été confiée à l’entrepreneur local Didier Oudoux, qui a bénéficié de l’aide de sa femme Nadine. Le couple a ainsi restauré cette bâtisse bourgeoise à quatre mains. De la démolition de cloisons à la plomberie en passant par l’électricité jusqu’à la réfection complète de la toiture en ardoise, Didier a assuré tout le gros œuvre. Puis, comme Bertrand souhaitait rester fidèle à l’esprit des lieux en mettant en valeur certains éléments d’origine, il a fallu mettre à nu les matériaux anciens de la maison avant de les rénover avec soin. Nadine s’est chargée de décaper toutes les boiseries au décapeur thermique et au grattoir, un travail laborieux et chronophage. Le résultat est à la hauteur des heures passées : le vieux bois des murs presque brut, la briquette naturelle et le parquet en chêne au sol dialoguent maintenant à l’unisson dans la demeure, jouant les fils conducteurs entre les espaces de vie.

Restait à insuffler à ce cadre plein de caractère les codes d’aujourd’hui. « Notre idée était de proposer un univers confortable, rehaussé par un mélange de styles et d’époques différents, pour affirmer un côté contemporain, avec une touche d’originalité. Pour cela, nous avons chiné ici et là du mobilier, dans des salons déco ou des brocantes, ou encore au fil de nos balades, pendant des week-ends ou des vacances », détaille Bertrand. Aux antipodes de l’architecture classique du lieu, le salon juxtapose ainsi motifs et styles. À l’étage, les chambres jouent les accords de teintes et de matières, tantôt vitaminées, tantôt feutrées. Rideaux, fauteuils et banquettes retapissés avec des tissus Pierre Frey par le tapissier local Thierry Le Garff s’y succèdent dans une belle unité.

Aménagé par le paysagiste Sylvain Canu, le jardin de 1 800 m2 prolonge l’intention des propriétaires. Des allées aménagées avec des bordures en acier Corten® (rouillé) permettent de déambuler au gré des différents espaces : le potager, le jardin zen, un îlot de verdure arboré pensé comme une petite forêt sauvage et une partie aérée propice à la détente, sans oublier le poulailler. Les lieux portent définitivement bien leur nom, « Le Jardin Découverte », offrant une halte privilégiée aux amoureux de la nature.

Fenêtre sur nature

L’heure est à la convivialité dans la cuisine, lumineuse et fonctionnelle. Le spectacle qu’offre le jardin s’invite par les grandes ouvertures en bois. Une belle table en chêne à tiroir chinée en Auvergne dialogue avec des éléments de cuisine « Abstrakt » Ikea, résolument contemporains.

Cachet brut

L’escalier en chêne brut entièrement décapé (dont le garde-corps en fer forgé semble avoir toujours été là) mène vers les quatre chambres du premier étage. Le mur en briquettes a été mis à nu et rejointoyé pour apporter une touche d’authenticité à l’entrée.

Simplicité bien trouvée

Au sol, les dalles en grès cérame façon ardoise agrandissent l’espace. Le piano de cuisson Ikea a trouvé sa place dans l’ancienne cheminée, condamnée pour devenir un élément de décoration à part entière.

Décor personnel

Priorité au confort avec ce généreux canapé trois places en flanelle Zuiver, ces fauteuils design vintage Zuiver et ce crapaud retapissé d’un tissu pied-de-poule Pierre Frey par Thierry Le Garff, tapissier à Conches.

Comme un air de vacances

Sous le jeu des suspensions en matières naturelles Ay Illuminate, la salle à manger s’offre un écrin de boiseries sans fard, que rehausse un parquet en point de Hongrie d’origine. À la place d’une cheminée en marbre, une cheminée décorative avec son manteau venu de Savoie se marie à une table haute en sapin chinée.

Sur la sellette

Ce coin toilette a été agencé à partir de matériaux bruts dans un esprit récup’ très nature : vasque en pierre chinée ornant une sellette en bois Asiatides sur fond de vieux bois, clin d’œil à l’esprit chalet. Une échelle ancienne en chêne sert de porte-serviettes

Jeux de perspectives

Avec son mur orange vitaminé Farrow & Ball, cette chambre ne manque pas peps. En tête de lit, l’espace est optimisé grâce à une tablette suspendue en guise

En enfilade  

Les portes d’origine moulurées, en sapin, ont également été décapées en accord avec les nuances miel des boiseries. Un vieil établi chiné en Auvergne sert de desserte et de rangement dans la suite.

Leçon de styles

Une palette de tons sourds crée une ambiance feutrée propice au cocooning. Placards et boiseries s’associent avec une banquette recouverte de tissu Pierre Freyet un fauteuil Louis XV tout de cuir vêtu.

Effet de matières

Avec son meuble à tiroirs ancien trouvé en Savoie et ses fauteuils de style Louis XV retapissés de couleurs flashy, la pièce de réception assume volontiers ses contrastes, sur fond de mur en briquettes. Dictée par les coups de cœur des propriétaires, la décoration mêle pièces chinées et sculptures d’art brut.

Bain de soleil

Côté jardin, la maison affiche un grand nombre de baies dont les menuiseries en chêne neuves assurent le confort thermique dans le respect du patrimoine. La lumière et les rayons du soleil transpercent désormais le cœur de la bâtisse.

Ode à la détente

Sous sa toiture en tuiles du pays de récupération, l’atelier de menuiserie de l’ancien propriétaire, aujourd’hui transformé en salle de sport, a conservé un cachet brut avec ses vieilles fenêtres d’atelier de guingois.

En savoir plus
Crédit photo :
Olivier Hallot
Article paru dans le n°
11
du magazine.

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